ASSEMBLEE GENERALE DU FRONT SYNDICAL DE CLASSE (24 SEPTEMBRE 2011) : RAPPORT INTRODUCTIF (BILAN D'ACTIVITE)

Publié le par Tourtaux

Front Syndical de Classe
Créé par des militants CGT et FSU

« Rien ne fait plus de mal aux travailleurs que la collaboration de classes. Elle les désarme dans la défense de leurs intérêts et provoque la division. La lutte de classes, au contraire, est la base de l'unité, son motif le plus puissant. C'est pour la mener avec succès en rassemblant l'ensemble des travailleurs que fut fondée la CGT. Or la lutte de classes n'est pas une invention, c'est un fait. Il ne suffit pas de la nier pour qu'elle cesse : renoncer à la mener équivaut pour la classe ouvrière à se livrer pieds et poings liés à l'exploitation et à l'écrasement. »
H. Krasucki

Assemblée générale du Front Syndical de Classe (24 septembre 2011) : rapport introductif (bilan d'activité)

 

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Chers camarades,

 

C'est en juin 2009 qu'est née notre association, sous l'impulsion de militants CGT et FSU, suite aux contacts pris après la « lettre ouverte aux états-majors syndicaux » signée par plusieurs milliers de syndicalistes.

Partant du double constat de la violence de l'offensive antisociale menée par le grand capital et les institutions à son service d'une part et d'autre part de la dérive des directions syndicales arrimées à la Confédération Européenne des Syndicats (CES), l'article premier des statuts du Front Syndical de Classe (FSC) précisait :

 

 

« Dans une démarche clairement intersyndicale, le FSC a pour objet non pas de devenir une nouvelle organisation syndicale mais d'être unlieu "central" de regroupement des militants et syndicats de classe afin de :

mener la lutte pour « le tous ensemble en même temps » à partir des besoins réels des salariés pour gagner enfin face à l'offensive capitaliste relayée par les gouvernements nationaux et l'UE

contribuer à aider les militants dans le respect des organisations existantes, à se réapproprier leurs organisations et à les remettre sur les rails du syndicalisme de classe et de masse.

constituer un lieu de repli pour les militants ou syndicats exclus de leurs organisations syndicales, mener inlassablement la bataille pour la solidarité de classe contre la répression patronale et étatique dont sont victimes les travailleurs combatifs.

 

Le FSC, poursuivaient les statuts, reprend à son compte les principes gagnants du mouvement ouvrier et en particulier de l'histoire de la grande CGT liée au combat pour la suppression de l'exploitation capitaliste. Attaché à l'internationalisme, le FSC milite pour le départ de la CES et de la CSI et pour la réadhésion à la FSM qui regroupe des dizaines de millions d'adhérents sur des bases de classe et de masse, an Amérique Latine, en Asie ou en Europe comme en Grèce. »

 

Deux ans après, Quel bilan faire de la situation et de notre action ?

Quelles perspectives dresser pour la suite ?

 

Tout confirme pour l'heure la gravité de la situation et que les travailleurs ne peuvent compter que sur eux-mêmes.

 

Depuis la fin des années 1960 et des Trente glorieuses (pas si glorieuses que cela mais marquées par le développement de la production et de la productivité, lié pour aller vite à généralisation du travail à la chaîne et aux destructions massives de capital durant la 2de GM), le capitalisme est dans une crise systémique liée aux contradictions du processus de valorisation du capital qui recouvre désormais quasiment toute la planète : contradiction entre travail mort et travail vivant dans le cadre de la hausse de la productivité, utilisation de la dette pour continuer à valoriser le capital mais qui a repoussé en l'aggravant la crise de suraccumulation (nous y sommes aujourd'hui)... De récession en krach et de krach en récession, le stade actuel du capitalisme, sénile, pourrissant,... est entièrement régressif avec une course en avant dans l'écrasement des prolétaires, dans la guerre sociale et les guerres tout court.

 

Dans les conditions créées par la crise économique mondiale, le sort des masses laborieuses, partout dans le monde, se détériore rapidement : chômage, précarité, misère, répression, casse des systèmes solidaires frappent avec une grande violence.

Dans notre pays, c’est tout un système dirigé par un mécanisme unique Etat/monopoles qui saigne le peuple avec comme levier principal la construction européenne et l’Euro. Tout passe à la moulinette euro-patronale :

 

- c’est d’abord la réduction dramatique du pouvoir d’achat par le ciseau entre prix qui montent (avec des prix de monopole par exemple sur les produits énergétiques) et salaires comprimés voire en baisse pour de nombreux travailleurs. La bataille pour le salaire, qui est une des batailles majeures pour réduire le taux d’exploitation, doit être non seulement soutenue mais mise au rang de priorité alors qu’elle a, au niveau des confédérations, été mise en veilleuse depuis le début des années 1980 et la désindexation des salaires sur les prix.

 

- la moulinette euro-patronale, ce sont encore les attaques contre l’emploi, les retraites bien sûr sans oublier les retraites complémentaires, la Sécu, c’est l’intensification et la souffrance au travail, la casse de l’industrie et les délocalisations (la situation de l’automobile est exemplaire de ce processus, après le textile, les mines et la sidérurgie), c'est aussi la grande offensive contre les services publics : privatisations, assèchement budgétaire, destruction de l’emploi public, imposition des règles « managériales » sur le modèle de France-Télécom et de la Poste, avec la destruction en cours des statuts de 1946. Au final, les services publics et la FP sont en train d’être désossés et avec eux pas seulement les intérêts de ses agents en grande souffrance mais aussi ceux de l’ensemble de la population.

 

- la moulinette euro-patronale, ce sont encore les attaques anti-démocratiques d’un pouvoir ultra-minoritaire qui accompagne sa casse sociale d’une dérive autoritaire visant à interdire ou à intimider toute résistance : médias aux ordres bien sûr, justice de classe, attaques contre les libertés syndicales et les libertés publiques (loi LOPPSI2...), mépris souverain pour le peuple digne de l’aristocratie d’Ancien Régime, répression étatique et patronale qui s'accentue contre les militants syndicaux combatifs, comme l’illustre actuellement la répression qui s'abat sur les héroïques syndicalistes CGT de Goodyear à Amiens.

 

Derrière toutes ces attaques qui visent dans notre pays à détruire le modèle social issu des luttes populaires et de la Résistance, il faut insister sur le rôle déterminant de l’UE des monopoles qui poursuit son travail de sape des acquis sociaux et des souverainetés populaires. Non seulement l’Euro est une arme de guerre contre les travailleurs, mais c’est l’UE qui pilote les privatisations ou la casse des systèmes éducatifs et de protection sociale livrés au capital financier. Et aujourd’hui, au nom de la « dette », comme ils disent, une étape supplémentaire est en marche.

Groupes financiers, institutions officielles du capitalisme, agences de notations, médias…. utilisent à chaque fois le même argument : les peuples ont vécu au-dessus de leurs moyens, les déficits explosent, il faut rembourser la dette et rassurer les marchés financiers… C’est ainsi que sont justifiés l’appauvrissement massif de la population grecque, portugaise, espagnole, irlandaise, etc., et tous les plans de rigueur préparés par l’UE et le FMI, de même que la mise sous tutelle euro-bancaire des budgets nationaux, cette fameuse « règle d'or » dont on nous rebat les oreilles, en réalité une règle de plomb pour rester poli, qui n'est rien d'autre que l'institutionnalisation de la politique du capital.

 

C'est qu'en effet ce capital ne peut plus se survivre que dans la dégradation de toutes les conditions de vie, le pourrissement et les destructions. L’idée force est bien sûr qu'il n'y a pas d'avenir possible ou de progrès pour le mouvement populaire dans le cadre de ce système, qu'il n'y a plus de « grain à moudre ».

Et face à l'avalanche antisociale, face à la crise qui va se poursuivre et s'étendre, l’exaspération est réelle et les luttes vont, qu'on le veuille ou non, se multiplier. Ces luttes quotidiennes, tellement nécessaires, doivent donc plus que jamais être portées par la perspective du changement de système, nécessaire pour unifier et passer à l'offensive.

 

Le problème est que les idées révolutionnaires ont massivement reflué depuis deux ou trois décennies, au niveau politique comme au niveau syndical, avec la victoire des « réformistes », qu'on devrait même carrément appeler contre-réformistes, accompagnant d'une manière ou d'une autre toutes les régressions sociales et même désormais les guerres impérialistes.

Aujourd'hui, nous pouvons constater que malgré la colère, le mouvement populaire est déboussolé par des directions syndicales qui poursuivent dans la voie du syndicalisme rassemblé débouchant sur le moins-disant revendicatif, comme en témoignent encore très récemment les manœuvres autour de la journée du 11 octobre.

 

L'insistance permanente des directions nationales sur l’unité syndicale au sommet est la traduction française de l’unité des directions réalisée au sein de la Confédération européenne des syndicats, qui met les revendications populaires à la remorque des tenants de la collaboration de classes.

La CES, qui n’a jamais cessé de soutenir les mesures les plus anti-sociales et anti-démocratiques impulsées par l'UE du capital, revendique de travailler pour la construction européenne sur la base du dialogue et de la négociation avec le grand patronat et les institutions officielles : elle n’est rien d’autre que le « versant » syndical de l’UE (et financé par elle) pour accompagner la régression sociale tous azimuts au cœur de la construction européenne et pour évacuer toute idée de lutte des classes.

Pour la CES, les travailleurs n’ont pas à se poser la question du changement de société : ils ont à organiser un lobbying  tandis que toutes les rênes sont laissées aux grands patrons. Cette doctrine, savant mélange de réformisme, de christianisme social et de syndicalisme jaune, évacue jusqu’à la notion même de lutte. Le cadre du syndicalisme est alors bien défini par la notion de partenaires sociaux : les syndicats doivent prendre en compte les contraintes de la production et le patronat doit présenter les implications sociales de ses projets.

En d’autres termes, les syndicats doivent accepter les décisions patronales et seulement en négocier (et encore pas trop longtemps) les conséquences, quitte à donner le change aux plus combatifs par l’organisation de manifestations une ou deux fois par an. Quant à unir les luttes communes quand elles se développent dans plusieurs pays, on n’y pense même pas. 

Ce syndicalisme est clairement un outil capitaliste dans le mouvement ouvrier : il sème des illusions sur le fait qu’un capitalisme à visage humain serait possible et que le capital pourrait être régulé et contrôlé. Dans la pratique, les forces d’accompagnement et opportunistes sont en phase avec les objectifs du capital européen et on se souvient encore de la CES appelant en 2008 à « sauver le capitalisme » ou en 2005 à voter pour la constitution européenne.

Ce type de syndicalisme ne date pas d’hier. Depuis que la force et les luttes des travailleurs ont imposé le fait syndical, la bourgeoisie a soutenu et entretenu des forces qui défendaient ses intérêts au sein du mouvement ouvrier, quand elle ne les a pas purement et simplement organisées.

En France, tous les mouvements sociaux impulsés par les bases sont en conséquence menés par les directions syndicales avec la volonté de ne pas globaliser les luttes ni les revendications, de ne pas bloquer la production, de ne pas demander le retrait des contre-réformes, de ne pas soutenir les secteurs les plus en pointe, de toujours supplier de pouvoir négocier la régression sociale, et avec un soin exprès apporté au calendrier et au rythme des mobilisations conçus pour l’échec tout en sauvant les apparences.

 

C’est aussi pour lutter contre ce syndicalisme qui a fait faillite et qui laisse les travailleurs sans défense organisée que le FSC a été créé. Pas comme une chapelle, mais avec la volonté de se battre pour la reconquête et la reconstruction par les bases combatives de leur outil syndical, efficace dans les conditions d’aujourd’hui comme a pu l’être la grande CGT de Frachon à son époque.

 

Le bilan que nous pouvons faire de notre action depuis deux ans est positif.

Nous avons réalisé un très gros travail dans la bataille d’idées, sur le syndicalisme international, sur le tous ensemble en même temps, ou à partir des travaux de fond réalisés par les camarades au sujet des retraites, de la Sécu, du produire en France, du salaire ou très récemment sur les thèmes de la souffrance au travail et de la dette.

 

Par les canaux à notre disposition et avec les forces qui sont les nôtres, nous avons contribué à faire avancer les idées de classe :

des dizaines de milliers de tracts ont été distribués dans pas mal de villes en France à l'occasion des rendez-vous de lutte (mardi encore, des camarades étaient présents à Amiens pour apporter notre soutien aux camarades de Goodyear).

notre site Internet : 80 000 visiteurs différents venant de 115 pays depuis un an, 15 000 visiteurs étant venus plus de 10 fois. 

Des informations régulières envoyées à plusieurs milliers d'adresses.

des réunions locales organisées dans le NPDC, en Bretagne, dans le Midi, en RP, Mayenne, Côte d'Or... ; dans certains cas, des structurations locales sont bien avancées comme dans le NPDC.

des échanges et contacts réguliers avec des syndicats ou des militants membres ou pas du FSC.

Tous ces éléments nous ont permis d’être présents dans la bataille d’idées et de populariser nos mots d’ordre.

De la même manière, des liens ont été établis avec la Fédération Syndicale Mondiale par la participation du FSC à plusieurs réunions internationales, par la diffusion de matériels FSM en France et par notre présence en tant qu’organisation affiliée au 16ème congrès du syndicalisme mondial à Athènes au mois d’Avril dernier.

 

 

Il faut regarder avec satisfaction tout ce travail et mesurer l'ampleur du travail fourni par les camarades alors que nous ne disposons pas bien sûr de permanents.

Mais aujourd’hui, nous sommes devant une étape à franchir. Il faut le reconnaître, le FSC n’a pas pour l’instant gagné la bataille de l'organisation, celle du développement et de l'implantation locaux, au plus près des travailleurs et des luttes.

Même s’il y a des avancées, avec en particulier un rebond des adhésions, la trop faible étendue de notre implantation militante rend difficile l’ancrage de notre activité dans les réalités locales, quotidiennes.

La priorité de notre AG est donc de travailler pour combler le décalage entre notre poids idéologique et notre poids organisationnel.

Car, face aux reculs sans précédent que les forces de la réaction et du renoncement s’apprêtent à infliger aux travailleurs français comme aux autres peuples d’Europe, il n’ y a pas d’autre voie que celle du combat de classe, du combat pour le renouveau du syndicalisme de classe, du développement de notre FSC, bousculant les prévisions pessimistes et libérant l’énergie et la créativité populaire !

Les colères populaires qui s’étendent ne peuvent que nous encourager à prendre à bras le corps les difficultés qui nous attendent. Alors qu’il n’y a rien à espérer des élections biaisées de 2012, gardons en tête cette citation d'Henri Krasucki tirée de sa préface au livre de mémoires de B. Frachon : « Rien ne fait plus de mal aux travailleurs que la collaboration de classes. Elle les désarme dans la défense de leurs intérêts et provoque la division. La lutte de classes, au contraire, est la base de l'unité, son motif le plus puissant. C'est pour la mener avec succès en rassemblant l'ensemble des travailleurs que fut fondée la CGT. Or la lutte de classes n'est pas une invention, c'est un fait. Il ne suffit pas de la nier pour qu'elle cesse : renoncer à la mener équivaut pour la classe ouvrière à se livrer pieds et poings liés à l'exploitation et à l'écrasement. »

 


Benoit Foucambert

Publié dans Lutte des classes

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