L'HOMMAGE DE L'HUMA A JOSEPH SANGUEDOLCE, ANCIEN MAIRE COMMUNISTE DE SAINT ETIENNE, RESISTANT, DEPORTE, SYNDICALISTE ET ANCIEN MINEUR : UN HOMME DE CONVICTIONS ET DE COURAGE

Publié le par Tourtaux

 

Joseph Sanguedolce. Une belle figure d’humanité

Décédé à quatre-vingt-onze ans, Joseph Sanguedolce, ancien maire de Saint-étienne, résistant, déporté, syndicaliste et ancien mineur, laisse le souvenir d’un homme de convictions et de courage.

Mars 1977, les élections municipales sont un tournant pour la gauche, dopée par le programme commun. Socialistes et communistes balaient la droite dans nombre de ses bastions. Giscard d’Estaing est président. Les communistes, contre toute attente, sont élus à la tête de villes comme Reims, Chalons, Saint-étienne. Mais cette dernière victoire à un goût particulier, elle va devenir symbolique. Le battu c’est Michel Durafour, ministre du Travail et ministre du Budget, maire de la ville depuis deux mandats. Le vainqueur c’est Joseph Sanguedolce. Syndicaliste, secrétaire de l’UD CGT, ancien mineur. Le mineur contre le ministre. Belle affiche.

 

résistant, militant,

homme de courage

 

À la tête de la plus grande ville de France dirigée par les communistes, ville ouvrière, avec des milliers de mineurs dans le bassin houiller, avec Manufrance, la célèbre manufacture d’armes et cycles et aussi des milliers d’emplois, le nouveau maire n’est pas un de ces tribuns à la voix de stentor qui rameutent les foules. De taille modeste, d’un abord plutôt discret et réservé, toujours respectueux de l’interlocuteur, c’est pourtant un résistant, un militant, un homme de courage et de convictions. Ses parents ont quitté la Sicile après la guerre de 1914 et la fermeture des mines de soufre ; à la maison on parle sicilien. Le gamin passe cependant son certificat d’études et à douze ans, c’est la mine, au triage. Il a quinze ans quand son père lui achète un vélo. C’est un passionné. Toute sa vie il aura un vélo près de lui. Bien sûr il aurait voulu être champion, mais une chute et une fracture s’en mêlent. À la mine, le jeune homme découvre l’action militante avec son frère aîné qui dirige un mouvement de jeunesse et il s’oublie jusqu’à chanter l’Internationale. Viré.

Le Front populaire, les premières vacances, sans un sou mais lumineuses :« On couchait dans des meules de paille », et puis la guerre qui arrive comme l’orage. Mobilisé et prisonnier, Joseph Sanguedolce n’a de cesse de préparer une évasion qui échoue. Libéré en vertu d’accords sur les soutiens de famille, il va aussitôt entrer en résistance. Il faut organiser à la fois les luttes des travailleurs, désorganiser et saboter la production, échapper au STO, créer les premiers maquis en Haute-Loire. À la mine où il travaille de nouveau, il anime des groupes de la jeunesse communiste qui ne reculent pas devant les coups de main les plus audacieux et l’action armée.

Joseph Sanguedolce a gardé longtemps un vélo de ces années. Celui avec lequel il est arrêté, le 21 juin 1943. Les prisons, puis en Allemagne le camp de Dachau. Il n’est pas de ceux qui se flattent d’être des héros. À la Libération, il reprend la bataille syndicale. Il loge dans un HLM du quartier Beaulieu. Il est de toutes les luttes, jusqu’à celle-ci, pour la mairie, face au ministre.

La victoire fait grand bruit et la popularité à Saint-étienne du nouveau maire est considérable. Une fierté pour une population largement ouvrière.Mais la ville, le charbon et les mines, Manufrance, entrent dans une période de profondes mutations.

 

se battre contre

les banques et le pouvoir

 

On va entrer, après la victoire de François Mitterrand en 1981, dans la décennie des « gagneurs ». Manufrance est en sursis. La bataille va durer des années, rassembler jusqu’à cent mille personnes dans les rues de la ville. Joseph ­Sanguedolce va se battre avec les banques, avec le pouvoir, avec les affairistes comme Bernard Tapie. Il se bat, aussi, pour le charbon, alors que les importations de charbon étranger ne cessent de mettre en difficulté la production nationale… Le gouvernement de François Mitterrand prend le tournant de la rigueur. Les combats de Saint-Etienne et de son maire ne trouvent guère de relais dans les sphères du pouvoir et, au niveau local les ambitions s’aiguisant à gauche. D’importantes mutations sociologiques accompagnent les reculs industriels et l’image comme la politique du PCF apparaissent brouillées. En 1983, la droite reprend la mairie. Joseph ­Sanguedolce va continuer ses combats. Il sera l’un des créateurs du mémorial de la Résistance et de la déportation de la Loire, président de l’amicale des vétérans du PCF. Il est mort dans la nuit de jeudi à vendredi. Il avait quatre-vingt-onze ans et il laisse le souvenir d’une belle et grande figure d’humanité.

Maurice Ulrich

Publié dans Politique

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