LE SYNDICAT DES MARINS CGT EST DECIDE A POURSUIVRE LA DIRECTION DE LA SNCM EN JUSTICE. LES CAMARADES ATTENDENT DE VOIR SI LES PROPOS DE SARKOZY SONT CREDIBLES
Le conflit à la SNCM, que tout le monde imaginait assez simple à régler, a pris des allures désormais très agressives. La CGT et le Sammm revotent chaque matin en assemblée générale la reconduction du mouvement, bien persuadés que la direction planifie le démantèlement de la compagnie. La direction, elle, « noie le poisson » en affirmant que le retrait du 10e navire du port de Nice n'est pas de son fait... et en tentant de réarmer les navires. Frédéric Alpozzo, secrétaire général des marins CGT, est prêt à poursuivre le bras de fer qui dure maintenant depuis 29 jours. Il s'est confié à Corse-Matin.
Après un mois de conflit, les grévistes gardent-ils le moral et l'espoir d'en sortir dignement ?
Nous sommes sereins. Parce que les règles et les lois sont avec nous. On ne peut pas agir comme le fait la direction sans rendre des comptes.
Gérard Couturier a dit dans nos colonnes qu'il ne pouvait affréter un 10e navire puisque le port de Nice veut moins de trafic. Pourquoi insistez-vous ?
Lorsque nous sommes allés à Nice en manifestant, on nous a clairement annoncé que les horaires du NGV, supprimé ensuite par notre direction, avaient déjà été retirés pour la saison 2011 dès la fin du mois d'octobre ! Donc, bien avant que le port de Nice fasse connaître son désir de réduire les rotations ! Et nous avons appris que le port de Nice parlait de l'été uniquement, on aurait donc pu affréter le NGV en avril et mai, quand le trafic est encore raisonnable à Nice.
Et pour vous c'est un signe suffisant de la volonté de démanteler la SNCM ?
Oui et nous disons même qu'il y a une entente avec la Corsica Ferries. Nous sommes face à des actes de gestion qui ne respectent pas les règles d'une vie normale en entreprise. Comme lorsque l'on nous annonce le partenariat avec l'armateur Dreyfus.
Gérard Couturier dit, là aussi, que c'est un bon point pour la SNCM que cette association...
Quelle association ? Dreyfus fait déjà du fret sur l'Afrique du Nord. Il vient de se doter d'un navire pour absorber le trafic passagers. Il navigue sous le drapeau anglais et n'a jamais pris de marins français, à part peut-être quelques officiers français. Vous croyez qu'il va commencer aujourd'hui ? Et puis Dreyfus n'a jamais parlé de partenariat lui... Notre désengagement de l'Afrique du Nord était également dans l'audit de Marc Dufour.
Pourquoi cet audit est-il si important ?
Parce qu'il a été écrit par Marc Dufour avant que celui-ci n'intègre la SNCM. On sait que dans cet audit on parle de se débarrasser des secteurs pas assez rentables pour les actionnaires : les liaisons de Nice, l'Afrique du Nord... mais le problème est que cet audit n'est pas consultable. Je suis représentant au conseil de surveillance et on ne m'accorde que les conclusions de l'audit ! C'est insupportable !
Ce conflit n'est-il pas devenu une attaque personnelle contre Marc Dufour ?
C'est un ardent défenseur de la concurrence à la tête d'un service public ! On sait ce qu'il a fait à Air Littoral. Il y avait 1 000 employés d'Air Littoral réclamant qu'il soit poursuivi en justice. Nous ne sommes pas des illuminés à la CGT des marins. Marc Dufour a sauvé sa tête grâce à l'intervention du ministre Bussereau. Nous, nous voulons vraiment l'amener devant les tribunaux.
L'idée d'une compagnie bi-régionale est-elle une solution ?
Pas tant que la SNCM perdra 15 millions d'euros par an. Quelle collectivité peut se permettre ça ? Aujourd'hui Véolia veut réduire la voilure de la SNCM pour faire entrer de l'argent auprès de ses actionnaires. L'idée finale étant sans doute de garder seulement quatre cargos. En fait, sur la Corse, le marché n'existe vraiment que de juin à septembre. Pour assurer un service public de qualité, régulier, l'hiver, où il n'y a que 900 000 personnes qui font les traversées, il faut que l'été, la compagnie puisse faire des bénéfices et soit protégée. Si on ne change pas les règles, les collectivités n'auront pas intérêt à investir dans une compagnie qui perd de l'argent. La CTC est en train de réfléchir à une nouvelle organisation, notre direction devrait attendre de connaître ces nouvelles orientations.
Le dialogue avec Véolia peut-il reprendre ?
Ils affirment qu'il n'y aura pas d'issue négociée, ils veulent aller jusqu'au plan social. Mais nous, nous n'allons rien lâcher. Quand je pense qu'ils ont refusé la tenue d'un conseil de surveillance exceptionnel, qu'ils évoquent la vente du siège en plein conflit. Nicolas Sarkozy a déclaré, chez Eurocopter récemment, que l'État actionnaire d'une entreprise devait s'impliquer. On attend de voir.
Propos Recueillis Par Christophe Laurent
Source : Corsematin.com