MONSTRUEUX !

Publié le par Tourtaux

16/12/2009 à 13h08
Tollé après les propos de Lefebvre sur les Afghans

Justifiant les expulsions, le porte parole de l'UMP estime que les exilés afghans «dans la force de l'âge» doivent «assumer» leur devoir et défendre leur liberté dans leur pays. Les associations s'indignent.

 

Par CÉDRIC MATHIOT

(© AFP Stéphane de Sakutin)

«Des propos scandaleux». Alors que neuf Afghans ont été renvoyés à Kaboul, les propos de Frédéric Lefebvre justifiant les expulsions d’Afghans suscitent une vive polémique parmi les associations. Hier, le porte parole de l’UMP affirmait dans un communiqué : «Alors que de nombreux pays du monde, dont la France, sont engagés en Afghanistan, qui pourrait comprendre que des afghans dans la force de l’âge n’assument pas leur devoir, et échappent à la formation que, notamment les forces françaises, leur proposent pour défendre leur propre liberté dans leur pays?».

Argument repris presque mot pour mot ce mercredi par le député UMP Thierry Mariani: «Des militaires français sont engagés sur le terrain en Afghanistan, la France a pris le parti de soutenir la reconstruction de ce pays et il est, dans ces conditions, difficilement concevable que la jeunesse de ce pays ne prenne pas toute sa part à cet effort», insiste-t-il dans un communiqué, expliquant avoir plus d'«estime» pour les «jeunes Afghans qui ont fait le choix de rester dans leur pays pour le reconstruire et lutter contre les talibans aux côtés des soldats français qu'à ceux qui le fuient».

«C’est énorme, populiste, et scandaleux, s'indigne Damien Nantes, responsable national de la Cimade, association présente dans les centres de rétention et l'une des premières à alerter sur l'expulsion de mardi soir. Et cela témoigne surtout d’une méconnaissance totale de la situation en Afghanistan. On parle là de jeunes gens qui sont persécutés, en proie à des pressions de parts et d’autres, de la part des Talibans, des factions, qui vivent dans un pays qui connaît le chaos.»

Un argumentaire développé sur la Toile

Contacté par Libération, Pierre Henry, président de l’association France Terre d’asile, a vivement réagi lui aussi: «Depuis quand transforme-t-on sur simple volonté du porte parole de l’UMP des civils en militaires ou en résistants? Il faudrait rappeler à Monsieur Lefebvre que même dans notre beau pays, en 1940, toute la population française ne s’est pas transformée en résistants. Jusqu'à présent, on pouvait lire jusque là ces propos dans des forums ou des blogs, pas dans la bouche de dirigeants politiques ».

De fait, le communiqué de Frédéric Lefebvre reprend un argumentaire développé sur la Toile par des militaires. La prose du porte-parole de l'UMP est ainsi très proche de celle de Jean Salvan, général en retraite, qui avait envoyé une tribune au courrier des lecteurs du Monde. Cette lettre a une seconde vie sur le web, puisqu’elle tourne sur tous les forums, blogs et sites de presse. «J'étais révolté, écrit le général, en regardant  les informations le 27 septembre. A Calais et diverses villes de France, de jeunes Afghans, en pleine forme, venus chercher fortune en Europe ( .../...). Tous les jours, de jeunes militaires américains, britanniques, français etc. se font tuer pour défendre en Afghanistan les droits de l’homme et de la femme. Pendant ce temps, des Français dont la générosité dépasse le bon sens, entretiennent ces jeunes Afghans qui ont refusé de participer au combat que nous menons. Cela porte un nom: ils sont insoumis ou déserteurs. Si notre gouvernement croit sérieusement à l’engagement occidental en Afghanistan, pourquoi ne pas avoir embarqué ces jeunes gens dans des avions pour Kaboul, et les avoir confiés aux centres de formation des polices et des armées afghanes ?»

Comme l'avait noté le blog Secret défense de Libé.fr, le général Claude Le Borgne, au nom de l'association de soutien à l'armée française (ASAF), avait réagi dans les mêmes termes à la polémique sur les expulsions : «Alors que nos soldats risquent leur peau en Afghanistan (.../...), nous devrions ouvrir nos portes à ceux d’entre eux qui refusent les risques d’une guerre autochtone? Nous voici
complices de leur désertion. Car c’est bien de cela qu’il s’agit: ceux qui se réfugient chez nous désertent le combat qu’il leur faudrait mener
».
Source : Libération

Publié dans Afghanistan

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