COLLECTIF ANTIFASCISTE RENNAIS : QUI EST VRAIMENT LE FAMEUX ALAIN SORAL ?

Publié le par Tourtaux

8 novembre 2013 5 08 /11 /novembre /2013 11:08
collectif antifa rennais. Antifascisme : guides pratiques #1 : qui est vraiment Alain Soral ?

Depuis une dizaine d’années, une nouvelle figure de l’extrême-droite a émergé, portant un discours moins classique que celui du Front National : Alain Soral. Ancien membre du FN, qu’il quitte pour fonder une autre organisation d’extrême-droite, Egalité & Réconciliation, qui lui permettra de mieux se médiatiser, il brouille sciemment les pistes pour paraître, à première vue, plus respectable.
Autour de ce mouvement gravitent un certain nombre d’électrons libres, qui développent un arsenal d’écrits, d’analyses et de vidéos qui tentent également de rendre audible cette parole d’extrême-droite nouvelle formule. On peut citer parmi eux des auteurs comme Laurent James ou Marc-Edouard Nabe, l’inévitable Dieudonné, etc.
Le tournant ouvertement conspirationniste qu’a prit Alain Soral dernièrement, ses saillies antisémites de plus en plus claires et sa démagogie paternaliste à l’attention des français d’origine immigrée pourraient charmer un certain nombre de personnes qui à première vue ne seraient pas attirées par le vote FN. Une petite mise au point sur le personnage semble donc nécessaire : qui est vraiment Alain Sora
l ?

Un xénophobe, un raciste et un antisémite


Si Alain Soral aime prendre des poses d’intellectuel rebelle et se présenter comme un ennemi du «Système», la réalité dément totalement toutes ses prétentions «subversives». En effet, par ses nombreuses prises de position xénophobes, Soral s’intègre complètement dans le large consensus droite (UMP) – extrême droite (FN) basé sur la stigmatisation de minorités ethniques et/ou religieuses. Lorsqu’il s’agit de désigner des catégories de population comme bouc-émissaires, Soral fait même montre d’un zèle répugnant et n’oublie aucune des cibles «habituelles» des fachos. Quand Soral n’est pas en train de s’en prendre aux maghrébins et aux africains («on ne dira jamais assez à quel point la maghrébisation, l’africanisation […] de la France ont fait baisser vertigineusement le niveau de civisme et de civilité de la population française»1) ou de s’attaquer aux gens du voyage («le pittoresque voleur de poules [s’est transformé] en braqueur surarmé réputé pour son goût du sang»2), c’est parce qu’il est trop occupé à expliquer à qui veut l’entendre que les juifs veulent dominer le monde3, sont à l’origine de telle ou telle guerre4 et autres inepties complotistes inspirées des Protocoles des Sages de Sion5.

 

Un chien de garde de la classe dominante


La posture de «révolté» qu’affectionne tant Alain Soral est en complète contradiction avec ses opinions politiques (réactionnaires). Ainsi, Soral rejette les révolutions puisqu’il voit en elles, selon les fois, soit un complot des juifs (dans le cas de la Révolution française de 17896, de la Révolution russe de 19177 …), soit l’œuvre insidieuse de l’impérialisme américain (dans le cas de la Révolution tunisienne de 20118). Aux soulèvements populaires victorieux, Soral préfère de loin la stabilité des États garantie par des dirigeants autoritaires. C’est pourquoi Soral affiche ouvertement sa sympathie pour tout un tas de crapules d’hier et d’aujourd’hui, parmi lesquelles de Gaulle (général catholique aux convictions d’extrême droite), Saddam Hussein (qui a fait massacrer des milliers de kurdes), Vladimir Poutine (dont les mains baignent dans le sang du peuple tchétchène) ou encore le chef d’État iranien Mahmoud Ahmadinejad (dont les forces répressives ont écrasé par la terreur le mouvement de contestation de 2009)9.

Les conceptions économiques soraliennes penchent, elles aussi, nettement à droite. Dans son dernier ouvrage, Comprendre l’Empire, Soral se lance par exemple dans une charge contre les chômeurs, qu’il qualifie de «parasites» et de «rentiers du bas» vivant dans l’oisiveté au détriment de «la classe moyenne productive, la plus ponctionnée par l’État»10. Le genre de propos que ne renieraient assurément pas le Président Nicolas Sarkozy, la dirigeante du MEDEF Laurence Parisot, le chantre du néolibéralisme Alain Madelin, ou n’importe quel autre défenseur enragé du système capitaliste !

 

Un faux-ami de la cause palestinienne


Soral a compris tous les bénéfices – en termes d’audience et de capital sympathie – qu’il peut potentiellement retirer d’un soutien affiché à la cause palestinienne … Mais il est facile de démontrer que son positionnement en apparence pro-palestinien n’est que pure démagogie motivée par des considérations opportunistes. En effet, si Soral s’affirme souvent solidaire des palestiniens en lutte contre le colonialisme israélien, il est pourtant très loin d’être un anticolonialiste. Dans un de ses bouquins paru en 2002, Abécédaire de la bêtise ambiante, l’intellectuel d’extrême droite n’hésitait pas à mettre en avant un hypothétique rôle positif de la colonisation française : «les seules choses qui tiennent encore debout [en Algérie] (infrastructures, urbanisme …) sont celles que la France coloniale y a construites»11. Histoire que son message soit bien clair, Soral ajoutait dans la foulée que le seul espoir des Algériens était un retour de la présence coloniale française ! Si le facho Soral se permet de dénoncer les agissements criminels d’Israël, c’est principalement parce qu’il s’agit des pratiques coloniales d’un autre pays (souvent présenté comme «l’État juif», en plus) – son chauvinisme français reprenant généralement le dessus dès qu’il s’agit de porter un jugement sur le passé colonial du prétendu «pays des droits de l’Homme» …

Il est intéressant de constater que Soral appelle clairement les Français – en particulier ceux de confession musulmane – à voter pour Marine Le Pen à l’élection présidentielle de 201212 : «Je pense donc qu’aider à faire gagner Marine Le Pen est notre seul espoir d’échapper à la dictature mondialiste. Et je pense aussi que Marine Le Pen ne pourra pas gagner sans les voix des musulmans de France. Le Système le sait aussi, c’est pourquoi il pense que c’est joué d’avance. A Marine Le Pen et aux musulmans de nous surprendre !» Or la fille Le Pen – dont Soral assure la promotion – est présentée sous un jour plus que favorable par une bonne partie de l’extrême droite sioniste (notamment par la sinistre Ligue de Défense Juive) ! Ce qui n’est pas surprenant puisque, de 2004 à 2009, l’actuelle dirigeante du FN, alors députée européenne, faisait partie de la délégation communautaire pour les relations avec Israël … Dans une interview récemment accordée au quotidien Haaretz13, Marine Le Pen elle-même a tenu à rappeler que «le FN a toujours été pro-sioniste» … Le pseudo soutien de Soral à la lutte du peuple palestinien ne l’empêche donc pas de souhaiter l’arrivée au pouvoir du Front National – un parti qui, en plus d’avoir pour seul étendard la haine de l’Autre, a toujours soutenu le sionisme !

Les amis progressistes et sincères de la cause palestinienne ont évidemment tout à perdre à faire preuve d’indulgence envers Soral sous prétexte qu’il serait «antisioniste». Soral est un spécialiste du double discours et/ou du retournement de veste : marxiste mais également traditionnaliste14, arabophobe mais se voulant pro-palestinien, républicain convaincu15 désormais défenseur de la monarchie16 … «Antisioniste» autoproclamé aujourd’hui, Soral se dira peut-être sioniste demain, si ça peut lui permettre de vendre plus de livres et de faire plus de thunes … Car la seule véritable cohérence dans sa trajectoire politique, c’est qu’il est et a toujours été un bouffon réactionnaire au service de la classe dominante.

Notes
1| Alain Soral, Abécédaire de la bêtise ambiante, Jusqu’où va-t-on descendre ?, Pocket, Paris, 2003, p. 42. Citation à propos du regroupement familial, allant dans le même sens dans le même ouvrage - c’est nous qui soulignons – : «Dorénavant ces travailleurs solitaires, maintenus jusque-là isolés de la population française, auraient le droit de faire venir leurs femmes, et tous les fils qui naîtraient de ces esclaves humiliés et de leurs épouses brutalement déportées deviendraient français ! Bombe à retardement, quand on songe que tous ces z’y va qui pourrissent aujourd’hui l’ambiance seraient encore dans les couilles de leur père !», p. 41.
2| Ibid., p. 149.
3| Pour une allusion évidente à la prétendue volonté des juifs de dominer le monde – c’est nous qui soulignons -, voir Alain Soral, Comprendre l’Empire, Éditions Blanche, Paris, 2011, p. 72 : «Pilotés de New York, habités d’une idéologie faite de volonté de puissance, de violence destructrice et de mépris social puisé à l’Ancien Testament, c’est cette vision du monde et ce processus que nous appelons : Empire.»
4| Ibid, p. 186, à propos du documentaire Bosnia ! de Bernard-Henri Lévy : «Message : Sarajevo = cosmopolitisme, donc Bosnie = gentils et Serbes = méchants. Au même moment, ses deux comparses Finkielkraut et Glucksmann prendront parti, l’un pour les gentils Croates d’Ante Pavelic, l’autre pour les gentils Tchétchènes islamistes. Trois partis pris parfaitement contraires à leur supposée éthique lévinassienne, mais trouvant, comme à chaque fois, toute leur cohérence dans la géopolitique de l’Empire.». Il s’agit d’une variante d’une remarque déjà faite par Soral dans une conférence en 2009 au sujet de Bernard-Henri Lévy et Alain Finkielkraut : «ils ont chacun choisi leur camp afin d’attiser la haine et la violence» (cf : http://www.dailymotion.com/video/x8w8yn_alain-soral-conference-090309-parti_news).
5| Le Protocole des Sages de Sion est un plan judéo-maçonnique de conquète du monde, un faux concocté par la police secrète du tsar Nicolas II de Russie.
6| Comprendre l’Empire, op. cit., p. 72-73 : «Hier Italie, Angleterre … Aujourd’hui USA, demain Jérusalem ou Pékin ? L’oligarchie mondialiste, pas plus que le principe bancaire dont elle tire sa dynamique et son pouvoir, n’a de territoire ou de lieu. Comme le bernard l’hermite, le coucou ou l’asticot dans son fromage, cette aristocratie nomade et sans noblesse se niche partout où il y a de la richesse à capter et du profit à faire [...]. D’abord anti-catholique et s’appuyant sur la Raison pour triompher des monarchies européennes, la Banque, poursuivant sa fuite en avant prédatrice, est vouée à se montrer de plus en plus anti-humaniste à mesure de son développement …». Quant à savoir qui, selon Soral, se cache derrière cette « Banque » qui est « anti-catholique », on en a une petite idée en se reportant à la page 48 du même ouvrage – c’est nous qui soulignons – : «Une violence assumée [par la Banque] et encore accrue par l’idéologie de ses dirigeants et cadres, majoritairement formés à l’inégalitarisme méprisant de l’Ancien testament …»
7| Ibid., p. 69 : «On peut objectivement qualifier l’épopée communiste de ‘’judéo-chrétienne’’ : juive en haut pour la volonté de domination, chrétienne en bas pour l’espoir du partage…» De même, p. 68-69, Alain Soral évoque un «financement assez peu chrétien de la révolution bolchevique russe, moteur de tout le processus de socialisme réel, par des banquiers new-yorkais souvent issus de la communauté ashkénaze émigrée d’Europe de l’Est.»
8| Ce soir ou jamais, France 3, 17 janvier 2011 : http://www.dailymotion.com/video/xgm7r9_alain-soral-dans-ce-soir-ou-jamais-17-janvier-2011_newsundefined
Voir aussi : http://www.egaliteetreconciliation.fr/On-nous-ment-sur-la-revolution-tunisienne-5225.html
9| Comprendre l’Empire, op. cit., p. 70, 175, 177, 179, 201, 212 et 223 (concernant De Gaulle), p. 70 et 71 (concernant Saddam Hussein), p. 70, 215 et 216 (concernant Mahmoud Ahmadinejad), p. 217 (concernant Vladimir Poutine).
10| Ibid., p. 142. Dans Abécédaire de la bêtise ambiante, Jusqu’où va-t-on descendre ?, op. cit., p. 138, Soral assimilait d’autres catégories de population à des parasites : «Fascination pour le voyou, bientôt étendue à toutes les communautés potentiellement inassimilables : gens du voyage, sans-papiers, Albanais … qui cache surtout une connivence des parasites. Le bourgeois exploiteur et le voyou voleur logiquement réunis contre le travailleur : soumis, intégré, normal, loser …».
11| Abécédaire de la bêtise ambiante, Jusqu’où va-t-on descendre ?, op. cit., p. 15.
12| cf : http://www.egaliteetreconciliation.fr/Alain-Soral-Freysinger-a-reconnu-que-se-declarer-sioniste-etait-une-obligation-pour-acceder-aux-5825.html
13| cf : http://www.haaretz.com/weekend/week-s-end/the-daughter-as-de-demonizer-1.335743
14| Comprendre l’Empire, op. cit., p. 13 : «… cet essai pédagogique récapitule le parcours complet – allant de la Tradition au marxisme et du marxisme à la Tradition – qui seul permet la mise à jour du processus de domination oligarchique engagé depuis plus de deux siècles en Occident.». Pour le traditionalisme de Soral, voir aussi Comprendre l’Empire, op. cit., p. 27 à 30 (dénonciation du concile Vatican II, Soral reproche à l’Église de ne plus s’opposer à la Réforme protestante depuis Vatican II et reproche aux juifs de continuer à «nier l’Église et à professer son mépris» ; Soral émet une opinion positive sur ce qu’il appelle le «catholicisme authentique» – c’est-à-dire le catholicisme intégriste), p. 31 («Laïcité = franc-maçonnerie»), p. 95-96 (vision positive de l’éducation (?) dispensée par l’Église aux enfants sous l’Ancien régime), p. 112 («Laïcité, satanisme»), p. 192 (laïcité assimilée à une «religion maçonnique »), etc.
15| Abécédaire de la bêtise ambiante, Jusqu’où va-t-on descendre, op. cit., p. 98 : «1789, [...] 1848, [...] 1871, autant de dates héroïques qui font de la France la référence des gauches du monde entier.», et p. 237 à 239 (admiration pour Robespierre).
16| Comprendre l’Empire, op. cit., p. 18-19 (réfutation de l’existence d’un «absolutisme royal» présenté comme un «mythe», dénonciation du «génocide vendéen» et apologie des Chouans).

Publié dans Fascisme

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article