EGYPTE : L'APOCALYSME !

Publié le par Tourtaux

 

Egypte: l’armée met ses menaces à exécution, puis impose des couvres-feux

L’équipe du site


Egypte: l’armée met ses menaces à exécutionLa police égyptienne a mis mercredi ses menaces à exécution et a commencé à disperser les partisans du président islamiste déchu Mohamed Morsi, dans une opération qui a rapidement tourné au bain de sang avec des dizaines de morts.


Moins de trois heures après les premiers tirs de grenades lacrymogènes, un journaliste de l'AFP a compté 43 cadavres --tous des hommes dont plusieurs manifestement tués par balles-- dans la morgue de fortune de l'un des deux rassemblements pro-Morsi, celui de la place Rabaa al-Adawiya au Caire.


Dans cet hôpital de campagne au sol maculé de sang, les médecins débordés délaissaient les cas désespérés pour concentrer leurs efforts sur les blessures les plus susceptibles d'être soignées. Un homme qui respirait encore mais avait reçu une balle dans la tête n'a ainsi pas pu recevoir de soins, a constaté le journaliste.


Les autorités ont pour leur part annoncé l'arrestation des dizaines des partisans des Frères musulmans et la saisie d'armes.


Plus de 200 morts selon les Frères


Des dizaines de morts dans la dispersion des pro-Morsi au CaireLes Frères musulmans, l'influente confrérie dont est issu M. Morsi, ont annoncé un bilan dépassant les 250 morts et 5.000 blessés, tandis que les autorités recensaient sept décès, dont deux membres des forces de sécurité, et affirmaient que les manifestants avaient ouvert le feu sur la police.


Les pro-Morsi ont été pris par surprise par les bulldozers des forces de l'ordre car les nouvelles autorités avaient promis des "sommations" afin de laisser partir ceux qui le souhaitaient, en particulier les femmes et les enfants qui campaient depuis plus d'un mois sur les deux places.


Une des deux places des pro-Morsi "totalement sous contrôle"


Des dizaines de morts dans la dispersion des pro-Morsi au CaireDeux heures après le début de l'opération, le ministère de l'Intérieur annonçait que la place Nahda, le second rassemblement, était "totalement sous contrôle". Les Frères l'occupaient depuis près d'un mois et demi pour réclamer le retour de M. Morsi, destitué et arrêté par l'armée le 3 juillet.


En revanche, sur la place Rabaa, dont l'accès était interdit aux journalistes qui ne se trouvaient pas déjà sur les lieux, des tirs d'arme automatique résonnaient et une pluie de grenades lacrymogènes s'abattait sur le village de tentes, sur fond de chants religieux diffusés à plein volume par les haut-parleurs de l'estrade.


Un responsable de la sécurité a affirmé à l'AFP que des résidents avaient aidé les forces de sécurité à arrêter des dizaines de manifestants, alors que la télévision diffusait des images d'hommes menottés assis au sol et de familles portant des sacs plastiques escortés hors du site.


Des Eglises incendiées


En représailles à la dispersion, des islamistes ont commencé à bloquer des grands axes du Caire en incendiant des pneus en travers des routes, pour tenter de paralyser le pays en dénonçant un "massacre". Des heurts sporadiques avaient lieu dans plusieurs quartiers du Caire ainsi que d'autres villes du pays.


Selon les médias égyptiens et le correspondant de la chaine panarabe AlMayadeen, des pro-Morsi ont incendié des églises de la communauté copte dans les provinces d'el-Menia et de Sohag (centre), dont le patriarche avait lui aussi soutenu la décision de l'armée de destituer M. Morsi, toujours retenu au secret.


La ferme du célèbre journaliste égyptien, Mohammad Hassanein Haykal, a également été incendiée, vu qu'il entretient de bonnes relations avec l'armée, a rapporté AlMayadeen, citant des témoins.


Les Frères dénoncent un « massacre »


"Ce n'est pas une tentative de dispersion mais une tentative d'écraser d'une façon sanglante toute voix opposée au coup d'Etat militaire", a dénoncé Gehad el-Haddad, porte-parole des Frères musulmans, sur Twitter.


Sa confrérie a appelé "les Egyptiens à descendre dans la rue pour arrêter le massacre".


En réponse, le gouvernement a annoncé que le trafic ferroviaire en direction et depuis Le Caire était interrompu.


L'autorité religieuse al-Azhar se désolidarise de l'opération policière


Egypte/Cheikh Ahmad TayebLa mosquée Al-Azhar au Caire, la plus haute autorité sunnite dans le monde, s'est désolidarisée mercredi de l'opération policière qui a fait des dizaines de morts parmi les partisans de Mohamed Morsi, après avoir pourtant soutenu la destitution du président.


"Al-Azhar veut dire aux Egyptiens qu'elle n'avait pas eu connaissance des méthodes utilisées pour disperser les manifestations, sauf à travers la presse", a assuré sur une chaîne de la télévision publique le grand imam de la mosquée, Ahmed al-Tayyeb.


Mardi soir, des affrontements entre pro et anti-Morsi avaient fait un mort au Caire. Avant l'opération de mercredi, les violences entre pro et anti-Morsi et entre pro-Morsi et forces de l'ordre avaient déjà fait plus de 250 morts, essentiellement des manifestants islamistes, depuis fin juin.


Alors que le gouvernement et la presse quasi-unanime les accusaient d'être des "terroristes" ayant stocké des armes automatiques sur les deux places et se servant des femmes et des enfants comme "boucliers humains", les Frères musulmans ont répété à l'envi que leurs rassemblements étaient pacifiques.


Les nouvelles autorités, s'appuyant sur une partie de la population qui reprochait à M. Morsi d'avoir cherché à accaparer le pouvoir sans rien faire pour l'économie en crise, entendent lancer une période de transition devant mener à des élections début 2014.


Couvres-feux instaurés


En fin de compte, le gouvernement égyptien a imposé des couvre-feux au Caire et dans 11 autres provinces.


Le dernier décompte d'un journaliste de l'AFP rend compte de la mort d'au moins 124 manifestants tués sur la seule place Rabaa al-Adawiya, alors que les pro-Morsi multiplient les manifestations dans toute la capitale et d'autres grandes villes du pays.
  
"Après que la présidence a annoncé l'état d'urgence, des couvre-feux seront imposés de 19H00 (17H00 GMT) à 06H00 (04H00 GMT) jusqu'à nouvel ordre", a indiqué un porte-parole du gouvernement installé par l'armée après la déposition de M. Morsi.
  
Ces mesures s'appliquent pour un mois au Caire et aux provinces de Guizeh, d'Alexandrie, de Beni Sueif, de Minya, d'Assiout, de Sohag, de Beheira, du Nord et du Sud-Sinaï, Suez et Ismailia.
  
Toute personne qui ne respecterait pas cette mesure s'expose à une peine de prison, a précisé le gouvernement.

L'état d'urgence est entré en vigueur à 16h00 locales (14h00 GMT), a annoncé la présidence dans un communiqué lu sur une chaîne de la télévision publique.


Cette décision a été critiquée par les Etats-Unis . Selon l’AFP, le porte-parole adjoint de la Maison Blanche, Josh Earnest a condamné "avec force" le recours à la violence par l'armée contre les manifestants et a affirmé que les Etats-Unis "s'opposent au retour de l'état d'urgence" en Egypte.


Source: Divers

14-08-2013 - 14:28 Dernière mise à jour 14-08-2013 - 18:52


http://www.almanar.com.lb/french/adetails.php?eid=125354&cid=18&fromval=1&frid=18&seccatid=41&s1=1
 

Le Point.fr - Publié le 14/08/2013 à 22:46 - Modifié le 14/08/2013 à 22:53

Le couvre feu a permis un "retour au calme" dans toute l'Egypte mercredi soir, après la dispersion sanglante de mercredi.

La dispersion sanglante des manifestations au Caire réclamant le retour du président déchu Mohamed Morsi et les violences à travers l'Égypte ont fait mercredi 278 morts, en grande majorité des civils, a annoncé le ministère de la Santé.


Détaillant le bilan, le porte-parole du ministère Mohammed Fathallah a précisé que 61 personnes avaient trouvé la mort sur la place Rabaa al-Adawiya, principal rassemblement pro-Morsi et 21 sur la place Nahda, où étaient également massés des pro-Morsi.

 

Mais le bilan est probablement bien plus élevé, un journaliste de l'AFP ayant décompté 124 cadavres sur la seule place Rabaa al-Adawiya, QG des manifestants pro-Morsi au Caire, où le ministère de la Santé a fait état de 61 morts.

43 policiers morts

En outre, 43 policiers ont été tués, selon le ministère de l'Intérieur. Le ministre de l'Intérieur Mohammed Ibrahim a précisé que "dix-huit officiers de police, dont deux généraux et deux colonels, 15 agents, neuf conscrits et un employé civil de la police" ont péri mercredi, a-t-il détaillé. La police et l'armée ont pris d'assaut deux places de la capitale occupées par les pro-Morsi.

 

"Les instructions étaient de n'utiliser que les gaz lacrymogènes, pas d'armes à feu", a assuré le ministre. "Mais quand les forces de sécurité sont arrivées, elles ont été surprises par des tirs nourris", a affirmé M. Ibrahim pour qui "la police a fait preuve d'un maximum de retenue".

Calme précaire

Alors que le prix Nobel de la paix Mohamed ElBaradei a démissionné de son poste de vice-président, refusant "d'assumer les conséquences de décisions avec lesquelles il n'était pas d'accord", le Premier ministre nommé par l'armée Hazem Beblawi a, lui, salué la police pour "sa très grande retenue".


A l'issue d'une journée de heurts meurtriers, les autorités ont décrété l'état d'urgence et un couvre-feu dans la moitié des provinces, dont celles du Caire et d'Alexandrie (nord). Une heure après l'entrée en vigueur de ce couvre-feu, des responsables de la sécurité ont indiqué à l'AFP que le calme était revenu dans l'ensemble du pays.

Condamnations internationales

A Washington, le secrétaire d'État américain, John Kerry, a exhorté à organiser ces scrutins, condamnant un bain de sang "lamentable". La chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton qui, la première, avait tenté une médiation au Caire, a réclamé la levée de l'état d'urgence "dès que possible".


Paris a appelé à "l'arrêt immédiat de la répression" et saisi l'ONU "pour qu'en urgence une position internationale soit prise en ce sens". Son secrétaire général Ban Ki-moon a, lui, "condamné dans les termes les plus fermes les violences".

 

Ankara, qui s'était opposé à la destitution de Mohamed Morsi, l'Iran et le Hamas palestinien ont dénoncé un "massacre".


Le Qatar, principal soutien des Frères musulmans, a dénoncé "la méthode utilisée contre des manifestants pacifiques", tandis que Berlin lançait un appel au calme dans le pays, où les violences entre pro et anti-Morsi et entre pro-Morsi et forces de l'ordre avaient auparavant fait plus de 250 morts depuis fin juin, essentiellement des manifestants islamistes.

 

http://www.lepoint.fr/monde/egypte-278-morts-dans-les-violences-dont-43-policiers-14-08-2013-1714217_24.php


jeudi, 15 août 2013 01:48
Egypte :Apocalypse! par N. KRIM
 
Egypte :Apocalypse! par N. KRIM  
IRIB-Redoutée, l'intervention combinée police-armée -
contre les sit-in des Frères musulmans des places Rabé'â al-Adawiya et Nahda - eut finalement lieu, avec ce qui était le plus craint: un bain de sang! Hier, plus d'une centaine de morts (au moins 124 ont été transférés dans les morgues des hôpitaux). C'est l'aboutissement d'un bras de fer voulu par les islamistes contre le gouvernement intérimaire égyptien. Les «Frères» n'ont fait montre ni de souplesse, dans les conditions qui sont celles de l'Egypte, ni de prospective dans l'espoir de préserver ce qui pouvait l'être. Or, arc-boutés sur des croyances qu'ils pensent immuables, les deux parties n'ont pas cru devoir écouter et discuter avec l'adversaire du moment, qui pourrait, pouvait, être le partenaire de demain. Cela n'a pas pesé lourd face à la détermination des uns et des autres, pour être plus précis, celle des islamistes - qui veulent coûte que coûte (forts de leur légitimité électorale) organiser le pouvoir en Egypte à leur mesure, et celle de l'armée qui n'est pas près de céder aussi facilement ce pouvoir qu'elle détient et gérait depuis 1952 et le coup d'Etat des colonels qui ont déposé le roi Farouk II.

En fait, le pays des Pharaons n'est toujours pas sorti de cette séquence où l'armée - qui a des intérêts économiques fabuleux à défendre - estime de son droit de garder un droit de regard sur tout ce qui concerne la gouvernance de l'Egypte. De ces deux déterminations, aucune n'était près de céder ce qu'elle estime être ses «droits» ou ses «prérogatives». D'où l'issue qui ne pouvait s'achever que par le clash qui eut lieu dans la matinée d'hier quand la police a commencé à disperser, à coups de grenades lacrymogènes, les manifestants et «campeurs» islamistes des places al-Adawiya et Nahda. Il y a quelques jours, l'Egypte se trouvait sur une corde raide, personne parmi les antagonistes n'a pris conscience des retombées et conséquences qui pourraient être pour le pays au cas où un consensus entre les parties n'était pas trouvé. Or, cette corde vient de se rompre, plongeant l'Egypte dans l'inconnu. Première conséquence: le sang a coulé en Egypte. Que va-t-il en advenir pour le pays qui se trouve aujourd'hui au bord de la guerre civile? Face au drame auquel font face les Egyptiens, est-il temps de dire qui a eut tort ou qui a raison? Les choses n'en sont plus là. Pourtant, on ne peut manquer de relever que si la situation est arrivée à ces extrémités, à tout le moins sanglantes et regrettables, c'est en particulier du fait que les islamistes n'ont pas voulu saisir la chance qui s'est offerte à eux de construire le pays en participant à son développement. Les Frères musulmans égyptiens ont de fait manqué de prospective et de lucidité face au pouvoir. Un challenge dont les Frères musulmans égyptiens n'ont pas su en saisir les opportunités qui s'ouvraient à eux pour - à tout le moins - démentir les dires de leur incapacité à gouverner Cela d'autant plus que le pouvoir leur a quasiment échu sans que ceux-ci aient fait quoi que ce soit pour le mériter, qui leur était tombé aux mains au moment où ils s'y attendaient le moins. La révolte contre la dictature de Moubarak n'a pas été le fait des islamistes - qu'ils se revendiquent des Frères ou des salafistes - mais bien celui du peuple dans sa composante plurielle - jeunes, cadres, Coptes - représentant une Egypte laissée en marge par Moubarak et son clan. Or, une année en charge des affaires de l'Etat a suffi pour montrer qu'effectivement la mouvance des Frères musulmans n'avait pas le sens du pouvoir et de la gouvernance, comme de la diplomatie, dilapidant durant cette année de pouvoir, le capital confiance que le peuple égyptien lui assura. Ainsi, les Frères musulmans au pouvoir ont-ils fait tout faux? En fait, ceux-ci qui n'ont pu - à moins qu'ils n'aient voulu - sortir du carcan de la «fraternité» ont été incapables de s'adapter aux circonstances et conditions du pouvoir, étant appelés à administrer une nation et non une confrérie avec un guide auquel tous devaient obéissance. En plus, l'ex-président Morsi s'est montré tout au long de son année de pouvoir d'une intran-sigeance à tout le moins obtuse et un manque de pragmatisme flagrant. Sinon comment comprendre que l'urgence pour eux ait été l'instauration de la chari'â, cela dans un pays à forte communauté non musulmane. Ce manque de pragmatisme et d'anticipation conjugué à une vision étriquée du pouvoir ont, en fait, scellé les ambitions des islamistes à conduire les affaires de l'Etat. Pourtant, ils étaient près à défier cet Etat en occupant les places de la capitale - perturbant la vie sociale dans un pays au bord de l'effondrement économique et financier - avec toutes les conséquences que cela pouvait induire pour l'Egypte. Les Frères musulmans, en occupant la mosquée Rabé'â al-Adwiya et la place Nahda, savaient les retombées qui pouvaient s'ensuivre, qui poussaient les nouvelles autorités - en fait l'armée - à un bras de fer qu'ils savaient inégal avec le risque - calculé? - de déboucher sur l'irréparable. Ce scénario, nous l'avons déjà vécu en Algérie. Il fallut dix ans pour éteindre la tragédie de la fitna. Aujourd'hui, en Egypte, les islamistes rééditent leur irrédentisme.
 
 
Quel rôle politique de l’armée en Egypte
opinion
Photo : AP
 

Le retour de l’armée sur le devant de la scène pose de nombreuses questions sur la suite de la période de transition et l’ave­nir politique de l’Egypte. Est-elle sur la bonne voie de la démocra­tisation ? Ou risque-t-elle ce que certains appellent une « restau­ration » du régime autoritaire sous une forme nouvelle ? La réponse est probablement quelque part entre les deux. En tout cas, la route de la démocra­tie sera longue.


La crise dans laquelle se trouve aujourd’hui le pays est en grande partie la conséquence de l’échec de sa première expérience démo­cratique post-révolution. L’échec des Frères musulmans, pour une multitude de raisons, dans cette première épreuve a ramené à nouveau l’armée dans l’arène politique. Mais échaudée par les 16 mois de la première période de transition, où elle tenait direc­tement les rênes du pouvoir après la chute de Moubarak, l’armée a cette fois tenu à éviter les erreurs du passé. La première période de transition (11 février 2011-30 juin 2012) a été catastrophique pour l’image de marque de l’ar­mée, en raison de plusieurs erreurs dans la gestion des affaires du pays, une mission pour laquelle les militaires ne sont pas formés. Les violations des droits de l’homme, la bruta­lité et la violence dont les mili­taires ont fait preuve face aux protestations en tous genres ont particulièrement ruiné sa réputa­tion auprès d’une bonne partie de la population, notamment les révolutionnaires, du jamais-vu dans l’histoire moderne de l’Egypte, où l’armée a toujours été vénérée.

Après la révocation de Hussein Tantawi, chef du Conseil suprême des forces armées, et de Sami Anan, chef d’état-major, en août dernier, le nouveau com­mandement de l’armée s’est tenu à l’écart de la politique pour redorer son blason. Il a surtout profité savamment des erreurs à répétition du pouvoir tenu par les Frères musulmans pour retrouver sa popularité auprès de l’en­semble de la population. A l’oc­casion des manifestations du 2e anniversaire de la révolution, en janvier dernier, le président Mohamad Morsi a décrété un couvre-feu très impopulaire sur les trois villes du Canal de Suez et a chargé l’armée de l’appli­quer. Mais cette dernière s’est abstenue d’user de la moindre violence pour le mettre en oeuvre, au grand dam de Morsi. Au contraire, des vidéos circulant sur les réseaux sociaux mon­traient des soldats en train de jouer au foot avec des jeunes bravant le couvre-feu.


Les militaires ont également engagé un dialogue avec les forces libérales et révolution­naires et se sont employés à bâtir une relation de confiance avec elles. Et au fur et à mesure que l’opposition et la contestation montaient contre le président et la confrérie, l’armée, après une pre­mière période de neutralité, a fait savoir à l’opposition qu’elle la soutenait, au moins moralement. Le message était que l’armée ne pouvait pas agir de son propre chef contre le pouvoir, sans qu’il y ait d’abord un vaste mouvement populaire la soutenant. En d’autres termes, le message était le suivant : « Mobilisez-vous et nous vous suivrons ». Sans profi­ter d’une aide directe de l’armée, le mouvement Tamarrod (rébel­lion), à l’origine de la forte mobi­lisation populaire du 30 juin venant à bout du régime de la confrérie, a ainsi bénéficié du soutien moral et politique des militaires qui avaient, eux aussi, leurs griefs vis-à-vis du président Morsi. Outre sa politique inté­rieure qui a élargi le fossé entre pouvoir et opposition, l’armée s’inquiétait fortement de sa poli­tique étrangère à dimension reli­gieuse et sectaire en faveur du Hamas (une branche des Frères musulmans) en Palestine et contre le régime alaouite (branche du chiisme) de Bachar Al-Assad en Syrie. Elle la considérait de nature à mettre en danger la sécurité nationale de l’Egypte.


Après avoir constaté que l’écrasante majorité des Egyptiens qui sont descendus par millions dans les rues le 30 juin (plus nombreux que ceux qui avaient manifesté contre Moubarak en février 2011) veu­lent en finir avec le régime des Frères musulmans, l’armée a manifesté publiquement cette fois son soutien au départ du président. Le ministre de la Défense, Abdel-Fattah Al-Sissi, lui a alors adressé le lendemain le fameux ultimatum de 48 heures. Dans un geste symbo­lique, mais hautement significa­tif et extrêmement positif pour l’image de l’armée, des hélicop­tères militaires survolaient, avant la destitution officielle de Morsi, la place Tahrir, jetant des dra­peaux nationaux à la foule en liesse. Le 5 juillet, deux jours après le renversement du prési­dent, des avions militaires dessi­naient un coeur, toujours dans le ciel de la place Tahrir, en signe de fusion avec les Egyptiens qui célébraient la chute des Frères.


Malgré cette haute visibilité, l’armée a tenu à éviter les erreurs de la première période de transi­tion. Elle a mis en avant les forces civiles lors de la présente deu­xième période et les a fait partici­per à l’élaboration de la feuille de route régissant le processus de transition. Pour rassurer, celui-ci est de courte durée : il prévoit des élections législatives et présiden­tielles, respectivement en six et neuf mois. Un président civil par intérim a été rapidement installé et un gouvernement civil formé. Toutefois, le chef de l’armée reste l’homme fort du régime intéri­maire. Il le restera au moins jusqu’à l’élection d’un Parlement et d’un président.


L’appel lancé le 24 juillet par Al-Sissi à la population pour manifester massivement le 26, en vue de donner mandat à l’armée pour sévir contre la « violence » et le « terrorisme » provoqués par les Frères musulmans et les parti­sans de l’ancien président Morsi, en a toutefois inquiété plus d’un. Notamment parmi eux ceux qui craignent les ambitions politiques de l’armée ainsi que les défen­seurs de la démocratie et du res­pect des droits de l’homme, car, sans écarter complètement l’exis­tence de possibles crimes sujets à des poursuites judiciaires, il pour­rait signaler un recours à la solu­tion sécuritaire pour régler un problème éminemment politique.


Pour le moment, l’armée s’en tient à son rôle de « sauveur » de la nation et de sa sécurité à un moment de très forte division politique, une mission qu’elle s’est toujours assignée de par la Constitution elle-même. La per­sistance — éventuellement au-delà des prochaines échéances électorales — de cette polarisa­tion porteuse de danger pour la stabilité et la sécurité du pays fera maintenir à l’armée sa position déterminante sur la scène poli­tique. Il n’est pas à écarter dans ce contexte qu’un militaire — le ministre de la Défense — se pré­sente à la prochaine présidentielle comme le lui demandent déjà cer­tains appels publics .


http://hebdo.ahram.org.eg/NewsContent/0/4/132/3382/Quel-r%C3%B4le-politique-de-l%E2%80%99arm%C3%A9e-en-Egypte.aspx

Publié dans Egypte

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