PROFESSEUR ISSA N’DIAYE SADI : L'ANALYSE DU CONFLIT AU NORD MALI ET DANS LE SAHEL

Publié le par Tourtaux

Jeudi 7 juin 2012 
 

 

      L'analyse du conflit au Nord Mali et dans le Sahel 



L’éditorialiste d’El Moudjahid,

organe officieux du gouvernement algérien,

analyse la genèse du conflit au Nord Mali et dans le Sahel.


La récente proclamation unilatérale de la République islamique de l’Azawad a été rendue possible, grâce à la conjugaison d’une série d’événements contre lesquels l’Algérie avait averti en temps réel. 

En 2003, le Sahel était encore terra nullius (la terre de personne) où avaient trouvé refuge les groupes terroristes du GSPC de Mokhtar Benmokhtar, acculés à la défensive puis battant en retraite sous la pression des forces spéciales algériennes. Pour sa survie, le GSPC fit allégeance à Al Qaida.

L’organisation terroriste qui se proclamera, quelques années plus tard, Al Qaeda au Maghreb islamique (AQMI), va se distinguer par ses prises d’otages pour s’autofinancer et installer durablement ses bases dans le Nord du Mali, un territoire de 800 000 km, la partie du territoire malien la plus difficile d’accès.

L’Algérie avait mis en garde les pays européens qui comme l’Allemagne, l’Autriche, la France et l’Espagne, ont payé pour obtenir la libération de leurs ressortissants enlevés par Aqmi. Les groupes de Benmokhtar et de Abdelhamid Abou Zeid ont pu amasser plus de 50 millions de dollars en 10 ans. La prise d’otages était devenue une source de financement des plus juteuses pour le trafic d’armes en direction du nord de l’Algérie. Il était encore possible vers la seconde moitié des années 2000 de pousser dans leurs derniers retranchements les salafistes qui circulaient librement dans cette immensité désertique de plus 4 millions de km.

La France et avec elle ses alliés européens engagés contre les Talibans en Afghanistan et les pirates de Somalie, à des milliers et des milliers de kilomètres de leur propre territoire, avaient ignoré délibérément le danger salafiste qui se trouve, aujourd’hui à un peu plus de mille kilomètres des Canaries, territoire européen. Ces alliés avaient fait la sourde oreille aux appels incessants de l’Algérie pour mettre en place une stratégie étroite contre le terrorisme, en collaboration avec les pays de la ligne de front (Algérie, Mali, Niger et Mauritanie).

Nicolas Sarkozy avait un tout autre plan alors : faire contrepoids au pacte de Tamanrasset sur le commandement opérationnel unifié de ces quatre pays dans la lutte contre Aqmi. Son objectif était en fait d’asseoir une nouvelle stratégie géo-politico-militaire dans cette partie de son ancien empire colonial. La région va payer chèrement la mise en œuvre de ce plan. Vint donc la guerre de Libye.

Une nouvelle fois, l’Algérie, et derrière elle l’Union africaine, avait averti des graves conséquences d’une déstabilisation régionale à grande échelle. De la région du Sahel, en particulier, où les armes les plus sophistiquées commençaient à circuler librement depuis le territoire libyen, jusqu’à Kidal, elles seront plus déterminées. Les peuples africains n’ont plus d’autres solutions que de dynamiter les horizons bouchés que leur imposent leurs dirigeants corrompus avec la bénédiction des occidentaux.

Malcolm X a été confronté au dilemme du choix entre le bulletin de vote et la balle de fusil. Il a fini par comprendre que le bulletin de vote ne l’amenait nulle part. Une balle de fusil mit fin à ses illusions. Mao a lui choisi le raccourci historique du « pouvoir au bout du fusil ».

Les faits semblent lui donner amplement raison.

Il nous faut rejeter la démocratie imposée par les menaces, les embargos et les bombes des puissances occidentales comme en Lybie, en Côte d’Ivoire ou ailleurs en Afrique et partout dans le monde. Ce n’est pas avec des discours et des bulletins de vote que les peuples s’affranchiront réellement mais par leur mobilisation massive, leur engagement pour leur propre salut sans aucune ingérence extérieure. Il leur appartient d’inventer leur voie pour ériger le monde nouveau qui pointe désormais à l’horizon.

Aucune main ne saurait désormais leur cacher le soleil de la véritable démocratie, celle qui est en train de naître de leur colère, de leurs frustrations, des impasses de la ‘démocratie des milliardaires’, une démocratie dirigée contre le peuple.

Les Maliens ont compris que les politiciens actuels de tous ordres, partisans de la restauration de l’ordre ancien, leur ont volé leur démocratie si laborieusement conquise en mars 1991. Ils l’ont vidée de sa substance et en ont fait un gadget, une sucette, leur sucette. Si le coup d’Etat du 22 Mars les a visiblement dérangés dans leur projet de festin ‘démocratique’, il n’a pour l’instant réglé aucun problème de fond sauf celui d’inscrire à l’ordre du jour leur surgissement sur la scène de l’histoire que la CEDEAO des Chefs d’Etat veut empêcher coûte que coûte.

Le peuple malien aspire à saisir la chance historique qui lui a été offerte par ce coup d’Etat pour réaliser son destin en toute indépendance et en toute liberté.

Il est condamné à l’assumer pour réinventer son avenir.

Pr Issa N’DIAYE SADI

avril 30, 2012

Tags: contre le peuple, Démocratie

Catégories: ACTU

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INFO REPRISE SUR LE SITE DE JEAN LEVY 

Publié dans L'Afrique en lutte

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