CUBA MET EN GARDE LE MONDE CONTRE UNE GUERRE NUCLEAIRE

Publié le par Tourtaux

Selon Fidel Castro, le monde risque de foncer sur une guerre nucléaire au Moyen-Orient, avec des conséquences catastrophiques. Pour éviter ce scénario, il s’adresse directement à la personne qui est en mesure de le prévenir : le président Obama.

Le samedi 7 août, un jour après l’anniversaire de l’attaque nucléaire contre le Japon, a eu lieu une séance extraordinaire du parlement cubain. C’était à la demande de Fidel Castro, qui est lui-même membre du parlement et président du parti communiste de Cuba. C’était sa première apparition au parlement depuis qu’il était tombé gravement malade, il y a quatre ans.

Le thème de la rencontre était la menace de guerre contre l’Iran. Selon Fidel, Israël a déjà pris la décision d’attaquer l’Iran. Les USA ont annoncé leur intention d’inspecter, avec Israël, tous les bateaux iraniens dans le Golfe Persique et le Golfe d’Oman. Iran a déjà déclaré qu’il ne laissera pas faire et qu’il fera couler les bateaux d’inspection. Ce qui entraînera probablement des représailles de la part d’Israël et des USA, ce qui mènera inévitablement à une attaque de missiles iranienne contre Israël. Israël pourra-t-il résister dans ce cas à la tentation d’engager son arsenal nucléaire ?
Fidel estime que ces inspections auront effectivement lieu et pendant cette séance parlementaire, il se demandait ouvertement s’il y a une issue de cette situation dangereuse. Dans une lettre antérieure, il s’était déjà adressé au président Obama, puisque c’est lui, en tant que commandant en chef de l’armée, qui prend la décision finale de démarrer une guerre ou non.

Le grand souci de l’ancien président de Cuba est resté quasiment sans échos dans les médias occidentaux, qui se sont axés plutôt sur des détails insignifiants, comme le fait que Fidel soit pour la première fois depuis 4 ans présent au parlement, qu’il avait l’air frais et dispos, qu’il portait à nouveau un costume vert olive et d’autres détails indispensables. Sans oublier l’incontournable spéculation que sa réapparition pourrait être interprétée comme une tentative éventuelle de s’emparer à nouveau du pouvoir…
 

 

Le cri d’alerte de Fidel n’est pas un fait isolé. Il y a peu de temps, un groupe de vétérans de la CIA a écrit une lettre ouverte au président Obama pour l’encourager à ne pas commencer une guerre contre l’Iran. Ils avertissent que Tel Aviv prépare déjà une attaque surprise au cours du mois d’août dans le but d’entraîner les USA dans le conflit. Netanyahu se sent confiant parce qu’il dispose de suffisamment de soutien au congrès nord-américain. Ainsi, 47 Républicains ont signé une déclaration de soutien dans laquelle ils confirment « appuyer le droit d’Israël d’utiliser tous les moyens possibles et nécessaires pour faire face aux menaces nucléaires de l’Iran et pour les éliminer ». Netanyahu ne doit pas non plus avoir peur des « médias qui sont pour une grande partie de tendance pro-israélienne », selon le mémorandum. Pour les vétérans, l’objectif d’Israël est très clair. Pour Tel Aviv, il ne s’agit pas d’armes nucléaires éventuelles, mais d’un changement de régime. C’est l’objectif israélien depuis longtemps. Dans l’élan de la guerre contre l’Irak, le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Bejamin Ben Elizer, déclara: ‘L’Iran et non pas l’Irak est l’ennemi principal. L’Iran disposera d’armes nucléaires vers 2005.’(1)
Les anciens officiers de la CIA soulignent également la docilité de Washington dans le passé et ils citent à cet effet le président Netanyahu: ‘Les USA peuvent facilement être ébranlés dans la bonne direction. … Ils ne nous gêneront pas… Quatre-vingt pour cent des Américains nous soutiennent. C’est absurde.” Tout comme Fidel, les vétérans s’adressent directement à Obama en disant que c’est lui qui a la clé pour prévenir une telle guerre. Ce qu’il doit faire, c’est vite condamner publiquement une attaque israélienne éventuelle afin de la prévenir pour l’instant.
Fidel Castro suit leur raisonnement en grande partie. Mais dans un numéro récent de ‘Reflexion’, il estime qu’Israël n’attaquera probablement pas comme premier puisque, dans ce cas, ils risquent d’avoir le monde entier contre eux. Grâce à la Résolution 1929, Tel Aviv a obtenu que les USA s’acquittent de ce boulot à leur place. La Résolution 1929 a été voté le 9 juin 2010 au Conseil de Sécurité. Douze voix pour, deux contre - le Brésil et la Turquie - et une abstention : le Liban. La résolution étend les sanctions contre l’Iran.

Qu’il existe bel et bien des plans pour attaquer l’Iran, c’est ce qu’a déclaré l’Amiral Mullen, un grand patron de l’armée USA, lui-même: ‘L’option militaire existait déjà depuis un certain temps et elle est toujours sur le tapis. C’est une des options dont dispose le président. A nouveau, j’espère que nous ne devrons pas la choisir, mais c’est une option importante et elle est sans équivoque.’ Le journal Washington Times a même déjà publié un scénario plus détaillé du déroulement d’une pareille attaque. Sur la carte suivante, vous voyez comment l’Iran est militairement complètement enserré par les USA.(2)
 

 

 

M. Lula, le président du Brésil, s’est aussi prononcé sur cette question lors du sommet du Mercosur. Au cours des mois précédents, son pays avait atteint un accord avec Teheran, qui était toutefois rejeté par Washington. Lula ne le comprend pas très bien. Iran était prêt à entamer des pourparlers avec le groupe de Vienne: les USA, la Russie et la France. Teheran avait aussi pris des engagements importants. ‘Nous avions exactement obtenu ce que le président Obama avait attendu de l’Iran.’ Mais malgré tout, l’accord a été rejeté et les sanctions ont été intensifiées. Lula ne comprend d’ailleurs pas non plus pourquoi il y a ce refus obtus de négocier avec le gouvernement iranien. ‘Le Président Ahmadinejad est élu et a donc un mandat de son peuple’, a déclaré Lula. Il est donc évident qu’il y a une négociation, à l’instar de celle qu’il y a eu avec son collègue de la Turquie. Le président du Brésil n’en veut pas de la logique de guerre et conclut: ‘nous ne voulons pas de guerre !’  

 

Cette logique de guerre des USA ne tombe pas du ciel. Les USA, grand pouvoir économique, tombent en ruine et perdent de plus en plus d’influence. La crise financière n’a fait qu’accélérer ce processus. Il semble que la Maison Blanche veut compenser l’influence économique et politique perdue par le pouvoir militaire. Tout d’abord, la présence militaire en Amérique latine, leur arrière-jardin, a été amplifiée ces dernières années. Ainsi, le nombre de militaires d’Amérique latine recevant un entraînement militaire aux USA a augmenté, tout comme le nombre de visites de militaires nord-américains supérieurs en Amérique latine. Après 9/11, le grand bassin caraïbe, qui comprend les îles caraïbes, le Mexique, le Panama et l’Amérique centrale, est devenu une partie de la région de défense nationale. Entre 2000 et 2006, la Colombie a reçu quelque 5 milliards de dollars en aide militaire, prenant ainis la cinquième place après l’Irak, l’Afghanistan, Israël et l’Egypte. Le nombre de bases militaires a été augmenté et en 2008, après soixante ans, la Quatrième Flotte est redevenue opérationnelle. La CIA était directement ou indirectement impliquée dans les coups d’Etat au Vénézuéla (2002) et au Honduras (2009).(3)
En Afrique aussi, les efforts militaires sont renforcés. En 2007, un centre de commandement unifié a été créé pour le continent, sous le nom Africom. Il est considéré comme un contrepoids face à la présence accrue de la Chine sur le continent.(4) En Asie, la présence militaire renforcée vise également surtout la Chine. A partir de 2010, 60% de la flotte militaire des USA se trouve dans la région asiatique.(5) Le Pacific Command emploie quelques 300.000 militaires, c’est un cinquième de l’armée nord-américaine. Un regard sur la carte montre que l’Empire du Centre est littéralement encerclé par des bases militaires nord-américaines. (6) Récemment, Hillary Clinton a intensifié la tension contre la Chine au niveau de la Mer de la Chine du Sud. Le fait que le navire de guerre sud-coréen Cheonan ait coulé fin mars, doit probablement être mis en rapport avec tout cela.(7)
 

 

Fidel estime qu’une guerre peut encore être prévenue, mais cela dépend d’Obama: ‘Un seul homme devra prendre la décision solitairement, le président des Etats-Unis’, dit-il dans une interview à la télévision vénézuélienne. Chaque président des USA a d’énormes pouvoirs, surtout lorsqu’il s’agit de la guerre, mais Fidel réalise bien que le pouvoir d’Obama est relatif et que ‘l’Empire ne peut pas exister sans son énorme appareil militaire. Fidel reste toutefois optimiste. ‘Obama n’est pas Nixon, qui était un cynique. Il n’est pas non plus un crétin comme Reagan. Et il n’est pas un imbécile complet ou hypocrite comme M. Bush.’ Fidel estime qu’Obama poursuit le bien et qu’il est un homme culturellement et intellectuellement développé.  

 

La situation au Moyen-Orient se trouve dans une impasse et au fur et à mesure qu’on n’en sort pas, la menace de guerre devient plus réelle. Pour Israël, la date limite est plus ou moins dépassée et à ce moment, le risque que le pays passe à ‘l’action’ est grand. En organisant une séance parlementaire extraordinaire, en présence de la presse étrangère, le parlement cubaine a fait une ultime tentative pour briser le silence frappant par rapport à cette guerre menaçante et il a adressé un appel exprès à la personne qui a le pouvoir de l’éviter. 

 

Sources 

Message de Fidel Castro au parlement, le 7/8/2010.
Interview de Fidel Castro à la télévision vénézuélienne.
‘Reflexion’ de Fidel du 10/8/2010.
Message du président Lula lors de la rencontre du Mercosur le 3/8/2010.
Les paroles de l’Amiral Mullen.
Memorandum des veterans de la CIA.
Article du Washington Times. 
 

 

Notes

 

(1) Cité dans Le Monde Diplomatique décembre 2002, p. 21.
(2) Dufour J., ‘The Worldwide Network of US Military Bases. The Global Deployment of US Military Personnel’. 
(3) Tokatlian J., ‘A View from Latin America’, in Roett R. & Paz G. (ed.), Roett R. & Paz G. (ed.), China’s Expansion into the Western Hemisphere, Washington 2008, 59-89, p. 64 en 68.
(4) Voir p.ex. Engdahl F., Full Spectrum Dominance. Totalitarian Democracy In The New World Order, Lexington 2010, p. 225v.
(5) AFP 24 avril 2006
(6) The Economist 19 november 2005, p. 22. Dans le pays Mongolie se trouve un pointillé. Les USA n’y ont pas encore de base militaire. Mais en octobre 2005, le ministre de la Défense de l’époque, Rumsfeld, a négocié avec le gouvernement de Mongolie sur l’installation d’une telle base. Depuis peu, il y a également des exercices militaires conjoints avec ce pays. Rozoff R., ‘Global Military Agenda: U.S. Expands Asian NATO To Contain And Confront China’, http://www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=20517.
(7) Selon Fidel Castro, ce n’est pas la Corée du Nord mais les USA qui sont responsable de l’incident du navire coulé. lire plus. Par rapport à cela, il est remarquable que la Suède, qui faisait partie de la commission d’enquête internationale, n’a pas voulu signer le rapport final. (The Economist, 31 juillet 2010, p. 43.). La Chine n’a pas non plus accepté les conclusions de la commission d’enquête. Beaucoup de Sud-coréens mettent d’ailleurs en doute la version officielle de leur gouvernement et ils soupçonnent les USA de l’incident. Ils se demandent pourquoi il fallait près d’un mois avant que le gouvernement lance son accusation. (Financial Times, 1 juin 2010, p. 7.)

 

http://cubanismo.net/cms/fr/articles/cuba-met-le-monde-en-garde-contre-une-guerre-nucleaire

Publié dans Cuba

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