L'HISTOIRE DES REPUBLICAINS ESPAGNOLS : " DES IDEAUX TOUJOURS VALABLES "

Publié le par Tourtaux

« Des idéaux toujours valables »
11-05-2012
 

 

 Henri Farreny va dans les archives contribuant ainsi à la découverte de l’histoire authentique des résistants espagnols. DR
Henri Farreny va dans les archives contribuant ainsi à la découverte de l’histoire authentique des résistants espagnols. DR
Fils de républicains espagnols,  Henri Farreny est militant associatif. Avec l’objectif de recouvrer l’histoire des antifascistes qui se sont battus pour la liberté, l’égalité, la fraternité.

 

Henri Farreny, vice-président de l’Amicale des Anciens Guérilleros Espagnols en France, présentera une conférence, sur les Républicains espagnols à l’invitation du Cercle catalan, demain à 16h  à la Cité des associations (1er)*.


Comment vous est venu votre engagement pour recouvrer l’histoire des Républicains ?
D’abord par ma famille Mon père après avoir combattu le fascisme en Espagne dans la 26e division (intégrant la colonne Durruti), sur le front d’Aragon, a été enfermé dans les camps de concentration d’Argelès, Saint-Cyprien, Agde, Septfonds. Il a travaillé aux Forges et Chantiers de la Méditerranée à Marseille pour la marine allemande. Dans l’usine, la résistance était animée par un Tchèque, mon père, jeune communiste, était son bras droit.
Mon grand-père maternel faisait partie de l’Union républicaine. Le gouvernement républicain l’avait mandaté pour acheter des armes aux pays Nordiques. Résistant, il a été l’un des dirigeants de l’Union Nationale Espagnole (UNE), mouvement politique analogue au Front national de la Résistance française. 
 
Quels sont les objectifs de l’Amicale des Anciens Guérilleros Espagnols en France ?
La défense des intérêts moraux et matériels des résistants espagnols. On aimerait rendre justice aux derniers vétérans avant qu’ils meurent parce que leurs idéaux et leurs actions ont été occultés. En mai 1945, l’Amicale des anciens résistants FFI espagnols est créée et disparaît 5 ans après avec l’opération Boléro Paprika (sous le gouvernement de centre gauche René Pleven. Mitterrand est secrétaire d’Etat) qui vise à expulser des antifascistes, essentiellement espagnols, de France.
L’association renaît en 1976 sous le nom de : AAGEF-FFI. A la fin des années 90, s’amorce le désir que les 2e génération aident leurs parents. 
 
Qui étaient ces guérilleros et pourquoi combattaient-ils ?
Ils étaient des réfugiés de la guerre d’Espagne, des combattants contre le fascisme coalisé d’Hitler, de Mussolini et de Salazar. Arrivés en France, ils se voient de nouveau acculés à la guerre.
Certains Espagnols, qui construisent les fortifications allemandes, vont se retrouver prisonniers et déportés dans les camps de concentration nazis, d’abord à Mauthausen. Ils seront donc amenés à réagir très vite. En raison, notamment, de leur engagement antérieur, de leur capacité à se rassembler du fait de leur enfermement dans les camps français, de leur haut degré de conscience politique et de lutte. Bien qu'étrangers, ils vont poursuivre leur combat antifasciste.
En zone occupée, ils animeront la Main d’œuvre immigrée (MOI). En Ile-de-France, les premiers attentats contre des garages allemands sont le fait du groupe armé de Conrado Miret Musté (fin 1941). Il meurt à Paris sous la torture en février 1942. En zone sud, les Espagnols s’organisent de manière autonome en fondant le XIVe corps de guérilleros (fin 1941-1942). En avril-mai 1942, 150 Espagnols sont arrêtés en région parisienne et en Bretagne par la police de Vichy. En zone sud, à partir de juillet 1942. 200 résistants espagnols sont arrêtés, la moitié sera déportée en Allemagne. Ce groupe est accusé des attentats d’août 1942 contre des voies ferreés à Figeac (Lot) et Toulouse (Haute-Garonne).
C’est René Bousquet qui dirige la chasse aux étrangers.

Quel était le rôle des Espagnols dans la résistance en France ?
Ils sont parmi ceux qui forment le levain de la Résistance, parmi les premiers engagés. Le XIVe corps est organisé dans une trentaine de départements. Il entre dans les FFI (créées en février 1944) comme une unité combattante autonome en mai 44, rebaptisée Groupement des Guérilleros Espagnols.
Ils s'engagent pour battre le nazisme et libérer la France avec l'objectif final d'aller libérer l'Espagne du fascisme. Tous les combattants espagnols de la MOI intègrent le Groupement des Guérilleros Espagnols. Ils livrent de dures batailles contre des colonnes allemandes en Dordogne, dans le Gard, l'Ariège, les Pyrénées-Orientales…. Ils sont en première ligne pour libérer Marseille, Foix, Toulouse, Rodez, Paris. Mon Père participe à la libération de Marseille avec le brassard FTP-MOI.
Dans la Ville rose, ils attaquent le commissariat central, la veille de la Libération, pour que les prisonniers politiques retrouvent la liberté. Des centaines d’Espagnols sont morts, on aimerait les honorer. Après la guerre d'Espagne, il restait en France entre 150 000 à 170 000 réfugiés espagnols. Leur taux de participation dans la Résistance est énorme : à la Libération, on estime leur nombre à 10 000 hommes en armes.

Qu'est-ce qui se joue aujourd'hui avec cette Histoire ?
La libération de la France terminée, l'Europe n'est pas encore libérée. Les antifascistes espagnols, qui se sont battus contre l'occupation nazie, s'attendent à ce que les Alliés soutiennent leur combat pour rétablir la démocratie en Espagne.
A partir de septembre 1944, 12 000 hommes vont rentrer dans la péninsule ibérique. Mais, l'offensive des Pyrénées est un échec face aux troupes franquistes (40 000 soldats). En cause également, ce qu’il convient d’appeler « la deuxième Non-intervention » des forces alliées. Après la Non-intervention pendant la guerre d'Espagne voulue par Léon Blum, c'est une grande tragédie pour le peuple espagnol. Cette deuxième Non-intervention a permis au dictateur Franco de se maintenir 30 ans de plus au pouvoir.
Les enjeux de nos jours sont de reconstituer cette Histoire. Il faut leur rendre la justice historique qui leur est due. Nous devons aussi rendre justice à leurs idéaux, à la noblesse, à la générosité de leur engagement, nous devons ainsi connaître et apprécier leur capacité à s'unir au-delà des différences politiques. Leurs idéaux sont profondément républicains, antagoniques avec le régime monarchique actuel. On ne peut pas admettre que 37 ans après la mort de Franco, on ait encore un régime que le dictateur a décidé. Les idéaux de la République espagnole : Liberté, Egalité, Fraternité sont toujours aussi valables.
Nous militons pour que la pertinence des idéaux républicains de 1931 soit au cœur de la transformation politique et sociale en Espagne. Pour nous, c'est la troisième République !


INTERVIEW REALISEE PAR PIEDAD BELMONTE


*93, La Canebière. Salle Phocéa.

 

http://www.lamarseillaise.fr/societe-quartiers/des-ideaux-toujours-valables-26779-2.html

 



  

Publié dans Lutte des classes

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H
Très intéressant, mérite d'être davantage connu car l'Histoire Officielle n'en parle pas assez même 70 ans après.
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J
Tout à fait d'accord avec toi mon camarade. J'ai toujours eu un coup de coeur pour les guérilleros espagnols mais aussi pour le peuple espagnol et sa Passionaria, Dolorès Ibaruuri, lors de ses<br /> combats contre Franco. Une pensée particulière aussi pour les valeureux combattants des brigades internationales.
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B
Que les idéaux républicains de 1931 se perpétuent et soient au cœur de la transformation politique et sociale en Espagne.<br /> C'est le voeu le plus cher que je formules pour le peuple espagnol.
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